Le 21 mai dernier, les élèves de cinq classes de première du lycée étaient réunis à la salle Blanche Montel pour assister à leur première Leçon de Littérature avec le poète et romancier Dominique Fabre. Cette rencontre s’inscrivait dans le cadre d’un dispositif mis en place par la région Île-de-France, en collaboration avec la Maison des écrivains, qui offre à une centaine d’établissements l’opportunité d’inviter un auteur contemporain.
C’est un quinquagénaire à l’allure ordinaire, qui est venu s’asseoir sur le bord de la scène. Il a raconté son parcours : une enfance sans père, un séjour en famille d’accueil à la montagne, bref, un de ces départs douloureux dans la vie qui sont parfois à l’origine d’un impérieux désir d’écriture. Mais plus que d’adopter la posture de l’auteur tel qu’on se l’imagine parfois, Dominique Fabre était surtout impatient de dialoguer avec les élèves et de répondre à leurs interrogations. Certaines de ses réponses ont paru pour le moins surprenantes. Ainsi, interrogé sur ce que devait être le rôle d’un écrivain aujourd’hui, il a simplement déclaré : « Moi, j’ai l’impression que je ne sers à rien. » même s’il a immédiatement noté que des auteurs comme Annie Ernaux avaient contribué à faire avancer la condition des femmes françaises.
Un peu plus tard, il a tout de même reconnu qu’il était de ces écrivains qui savent donner la parole à ceux qui ne l’ont pas. Dominique Fabre est en effet un romancier qui met volontiers en scène ces existences banales et ces vies minuscules, ces personnages ordinaires qui cachent selon lui, les véritables héros. Il a aussi éclairé les élèves sur la relation étrange qui le lie à ses personnages : « Je ne me projette pas dans mes personnages », a-t-il dit d’emblée et il a ajouté que c’étaient les personnages qui venaient « s’agripper » à lui et que ceux qui lui apparaissaient comme les plus éloignés de lui-même étaient ceux dans lesquels il se retrouvait…Curieux paradoxe alors que l’on est souvent tenté de faire du héros de roman un double de l’auteur ! Enfin, il a aussi parlé de son travail d’écrivain, esquissant l’image d’un auteur installé à sa table de travail très tôt le matin , écrivant sur une machine à écrire à ruban…un instrument « antique » qui lui permet de composer en toute liberté car selon lui, l’ordinateur a des yeux et des oreilles s’il est relié à internet. Une pratique qui lui a fait dire dans un sourire : « Je suis en avance sur mon temps. ».